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Modification obligatoire des statuts pour le 1er janvier 2024 : Oubliez le bâton, pensez à la carotte

Droit des sociétés

Les statuts de toutes les sociétés, associations et fondations belges doivent être adaptés aux dispositions du Code des sociétés et des associations pour le 1er janvier 2024 au plus tard. La responsabilité civile et pénale de cette adaptation obligatoire des statuts incombe aux administrateurs. Ils sont personnellement et solidairement responsables si la personne morale ou un tiers subit un dommage en raison de l’absence de modification des statuts. Ceci étant dit, étant donné que la responsabilité des administrateurs risque uniquement d’être engagée si la méconnaissance de la loi cause un préjudice effectif, il est permis de se demander si la sanction imposée est une raison suffisante de procéder à une modification des statuts. Le proverbial bâton s’accompagne toutefois aussi d’une carotte : la modification obligatoire des statuts peut être une bonne occasion de se débarrasser des restrictions de l’ancienne législation et de profiter des possibilités de la nouvelle.

19 juillet 2023


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L’obligation légale

Par la loi du 23 mars 2019, le Code des sociétés et des associations (« CSA ») a fait son entrée dans l’ordre juridique belge. La plupart de ses dispositions sont entrées en vigueur au 1er janvier 2020. Depuis cette date et pour toute personne morale existante, les dispositions statutaires contraires aux dispositions impératives du CSA sont réputées non écrites. Les dispositions impératives du CSA s’appliquent donc déjà à toutes les sociétés, associations et fondations depuis plus de trois ans, sans préjudice d’éventuelles dispositions statutaires dérogatoires. Les dispositions complémentaires du CSA ont pris effet à la même date, à moins que les statuts prévoient un régime dérogatoire.

Toutefois, afin d’éviter que des sociétés, associations ou fondations continuent de fonctionner sur la base de statuts dépassés, la loi prévoit que les administrateurs de ces entités doivent mettre les statuts en conformité avec le CSA pour le 1er janvier 2024 au plus tard. Le vendredi 29 décembre de cette année sera donc une échéance importante dans l’agenda de nombreux notaires et juristes d’entreprise.

L’examen de l’opportunité

C’est précisément parce que, d’une part, les dispositions statutaires contraires aux dispositions impératives sont réputées non écrites de plein droit et que, d’autre part, les statuts peuvent valablement déroger aux dispositions légales complémentaires du CSA, que peu de sociétés, d’associations ou de fondations ressentent un besoin urgent de mettre immédiatement leurs statuts en conformité avec le CSA. Le rare universitaire qui a osé suggérer que les administrateurs de certaines sociétés pouvaient ignorer la modification obligatoire des statuts a dès lors trouvé un soutien massif dans la presse.

Dans une perspective d’opportunité, il y a en effet beaucoup à dire sur cette position. La seule sanction liée à la méconnaissance de cette obligation est la responsabilité des administrateurs : ceux-ci sont personnellement et solidairement responsables des dommages qui pourraient résulter du non-respect de cette obligation.

Pour que leur responsabilité puisse être engagée, il faut toutefois qu’il y ait un préjudice concret présentant un lien de causalité avec la faute des administrateurs. Bien que les statuts de plus de deux tiers des sociétés belges n’aient toujours pas été mis en conformité avec le CSA à ce jour, nous ne prévoyons que peu de discussions en matière de responsabilité dans notre cabinet également. Même d’un point de vue théorique, le risque concret de cas de responsabilité liée à cette obligation reste faible. La sanction imposée par la loi ne semble être qu’un tigre de papier.

En réponse à une récente question parlementaire portant sur ce risque dans une société dite unipersonnelle (une société avec un actionnaire unique qui est également le seul administrateur), même le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne a répondu en substance :

« Pour la SRL unipersonnelle, le risque que le non-respect de l’obligation de mise en conformité des statuts avec le Code des sociétés et associations (CSA) cause un dommage effectif à la société ou à des tiers reste assez théorique, étant donné que le droit transitoire, établi par le nouveau CSA, a lui-même résolu le problème principal (de passage du capital en capitaux propres indisponibles). ». (Questions et Réponses chambre 2022-23, 24 mars 2023 (q. n° 1786 K. Houtmeyers)

Les opportunités juridiques

Il serait dès lors excessif de conclure qu’une modification des statuts serait totalement inutile dans toutes les circonstances. La modification des statuts exigée par la loi peut au contraire représenter une opportunité sur le plan juridique pour de nombreuses sociétés. C’est ainsi qu’une modification des statuts en phase avec le CSA peut être fortement recommandée si les statuts actuels contiennent encore une disposition reprenant :

  • la sanction de la caution solidaire pour tous les engagements de la société par l’associé unique — après avoir supprimé cette sanction, les groupes de sociétés pourront, par exemple, passer aisément à une structure avec un seul actionnaire par société ;

  • des limitations de la possibilité de résolutions écrites du conseil d’administration, par exemple aux « cas exceptionnels » où « l’urgence et l’intérêt de la société » l’exigent — après l’adaptation de cette disposition, la prise de décision par écrit pourra être appliquée de manière beaucoup plus généralisée ;

  • l’obligation d’avoir un « organe collégial de gestion » dans une SA — afin qu’une SA où un seul administrateur prend de facto toutes les décisions puisse aussi être légalement gérée par lui seul ;

  • des procédures souvent strictes en matière de transfert d’actions dans une SRL — afin de pouvoir, par exemple, recourir à la libre transférabilité si elle est souhaitable, etc.

Il peut en outre être intéressant de tirer parti de l’éventail de nouveautés offertes par le CSA. Songeons par exemple à la liberté de travailler avec des droits de vote multiples lors de l’assemblée générale des actionnaires, à la possibilité de poursuivre d’autres objectifs que la simple distribution des bénéfices dans une société, à l’exercice d’activités économiques de nature industrielle ou commerciale par une association, à la possibilité de verser des dividendes intérimaires dans une SRL, etc.

Enfin, nous attirons également l’attention, dans ce contexte, sur certaines formes de sociétés spécifiques ou sur des sociétés se trouvant dans des situations spécifiques. Pour ces sociétés, la modification des statuts sera en effet plutôt une nécessité qu’un luxe, parce qu’elles utilisent, par exemple, l’ancienne législation d’une manière que la nouvelle législation ne permet plus. Ce qui est par exemple le cas :

  • des sociétés anonymes qui disposent toujours d’un comité de direction : les comités de direction sont appelés à disparaître de notre ordre juridique au 1er janvier 2024. Davantage d’informations à ce sujet dans notre bulletin d’information («Les comités de direction appartiendront bientôt au passé») ;

  • des « fausses » sociétés coopératives à responsabilité limitée : ces sociétés seront converties en société à responsabilité limitée au 1er janvier 2024. Davantage d’informations à ce sujet dans notre bulletin d’information (« La SRL, un filet de sécurité pour les SCRL ; fermer les yeux et sauter ? ») ;

  • des formes juridiques supprimées par le CSA : sa société en commandite par actions, la société agricole, la société coopérative à responsabilité illimitée, etc. Davantage d’informations à ce sujet dans notre bulletin d’information («Le CSA a quatre ans»).

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