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Cour de Justice de L’union : conditions de validité d’une exigence de salaire minimum posée comme condition particulière concernant l’exécution d’un marché public

Marchés publics

01 décembre 2015


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Dans un arrêt du 17 novembre 2015 (arrêt RegioPost[1]), la Cour de justice a jugé qu'une autorité adjudicatrice était en droit d'imposer une obligation de salaire minimum au titre des conditions particulières concernant l'exécution du marché.

Dans les faits de l'espèce, l'autorité adjudicatrice (la ville allemande de Landau) avait renvoyé dans les documents pour un marché public de services postaux à une loi du Land de Rhénanie-Palatinat. Aux termes de cette loi, les marchés publics ne peuvent être attribués qu’à des entreprises (et à leurs sous-traitants) qui, lors du dépôt de l’offre, s’obligent à verser à leur personnel, pour l’exécution de la prestation, une rémunération minimale de 8,70 euros par heure.

Selon la Cour, l’obligation imposée par le Land de Rhénanie-Palatinat (et le renvoi à ladite loi par la ville de Landau), en vertu de laquelle les soumissionnaires doivent verser un salaire minimum à leur personnel est licite, dans la mesure où elle doit être considérée comme une condition particulière concernant l’exécution d'un marché compatible avec une considération sociale au sens de l’article 26 de la directive 2044/18.

La Cour a précisé la raison pour laquelle elle a validé cette mesure alors qu'elle s'était refusée à le faire pour une mesure sociale similaire dans l’arrêt Rüffert. Dans l’affaire Rüffert[2] (3 avril 2008), la Cour a estimé que la participation des soumissionnaires à un marché public ne pouvait être conditionnée à une déclaration de paiement d'un salaire minimum prévu dans une convention collective.

La Cour estime que l'arrêt RegioPost se distingue de l'arrêt Rüffert sur deux points :

  • L’obligation en cause dans l’arrêt RegioPost est compatible avec la directive 96/71[3] sur le détachement des travailleurs dans la mesure où elle découle d'une disposition légale. Dans l’arrêt Rüffert, aucune disposition légale n'avait rendu la convention collective en cause obligatoire pour tous et n'était dès lors pas compatible avec la directive 96/71.
  • Bien que l’obligation de salaire minimum puisse constituer pour les soumissionnaires étrangers une charge économique susceptible de prohiber ou de gêner leur participation au marché public, la mesure nationale est en l'espèce justifiée par l'objectif de la protection des travailleurs (article 56 TFUE). Ce n’était pas le cas dans l’arrêt Rüffert, où la convention collective s’appliquait uniquement au secteur de la construction, ne s'appliquait pas aux marchés particuliers et n’avait pas été déclarée obligatoire pour tous par une disposition légale.

L’arrêt RegioPost offre selon nous un éclairage important sur les modalités et la portée des considérations de durabilité (en l'espèce les exigences sociales) pouvant jouer dans les conditions d'exécution d'un marché public.

[1] Cour de justice de l’Union, arrêt du 17 novembre 2015, C-115/14, CLI:EU:C:2015:760

[2] Arrêt du 3 avril 2008,C-346/06, ECLI:EU:2008:189

[3] Directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services, JO L 18 du 21/01/1997 p. 0001 – 0006

Pour plus d'informations sur ce sujet, vous pouvez vous adresser à Jan de Leyn (l’auteur) et à Kris Lemmens (responsable de cellule)

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