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L'accord amiable judiciaire et l'accord collectif : règles générales

Restructurations

Ce bulletin d'information est le deuxième de notre série sur la transposition de la directive européenne sur la restructuration (la "directive"). Un nouveau bulletin d'information sur ce thème sera publiée chaque jeudi.

La directive oblige les Etats membres de l'Union européenne à prévoir des cadres de restructuration préventive, dont les principales orientations sont le « débiteur en possession » et la « suspension des mesures d'exécution individuelles ». Le Livre XX CDE belge prévoit déjà des procédures qui y répondent : la réorganisation judiciaire par accord amiable et la réorganisation judiciaire par accord collectif.

06 avril 2023


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Ces procédures ne peuvent pas être entièrement conservées dans leur forme actuelle. En particulier, le législateur belge a dû modifier l’accord collectif. Dans ce contexte, la loi actuelle prévoit que les créanciers votent tous ensemble sur le plan de réorganisation proposé par leur débiteur. La directive prévoit que ce vote doit avoir lieu « en classes de créanciers ». Cela s'applique en tout état de cause aux grandes entreprises. Le législateur européen permet aux États membres de déroger à cette règle pour les micro, petites et moyennes entreprises.  

 

Le législateur belge utilise cette possibilité. Le projet de loi transposant la directive sur la restructuration prévoit une répartition en fonction de la taille de l'entreprise. Les grandes entreprises sont des sociétés, associations ou fondations qui dépassent un ou plusieurs des critères suivants pendant deux exercices consécutifs : (i) une moyenne annuelle de 250 travailleurs, (ii) un chiffre d'affaires annuel hors TVA de 40.000.000,00 EUR et/ou (iii) un total du bilan de 20.000.000,00 EUR. Toutes les autres entreprises sont des PME.

 

Pour ces grandes entreprises, le Livre XX CDE prévoira un vote dans les classes, comme l'a demandé le législateur européen. Pour les PME, les créanciers continueront à voter dans une seule et même classe. Le législateur ne souhaite pas alourdir l'accès des petites entreprises à la procédure - déjà complexe. Toutefois, les PME peuvent choisir à relever du régime plus complexe prévu pour les grandes entreprises. Le régime spécifique aux grandes entreprises sera abordé dans notre prochaine lettre d'information.

 

D'autres changements sont imminents pour la réorganisation judiciaire par accord amiable ou collectif. Ils s'appliqueront à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. En voici les principaux :

 

  • Durée initiale du sursis limitée à quatre mois maximum : la mesure de sursis protège le débiteur pendant la négociation d'un accord amiable ou collectif contre les mesures d'exécution prises par ses créanciers ou l'ouverture d'une procédure de faillite. Actuellement, le tribunal peut accorder un sursis pour une durée initiale de six mois maximum, renouvelable jusqu'à 12 mois maximum et jusqu'à 18 mois, dans des circonstances exceptionnelles. Cette durée sera raccourcie. La période initiale de sursis sera réduite à un maximum de quatre mois. La prolongation reste possible, mais avec un maximum extrême de 12 mois au lieu de 18 mois.

  • L'accord amiable est désormais également possible avec un seul créancier au lieu d'au moins deux : selon le droit actuel, un débiteur ne peut conclure un accord amiable que lorsqu'au moins deux créanciers sont concernés. Afin d'abaisser le seuil d’accès de la procédure d'accord amiable, le projet de loi prévoit que l'accord peut désormais être conclu avec un seul créancier.

  • Effet suspensif de la requête ("repeat players") : le législateur renforce l'effet suspensif de la requête afin d'éviter les abus de « repeat players ». Lorsqu'une entreprise dépose une requête en réorganisation judiciaire auprès du tribunal de l’entreprise, elle bénéficie déjà de la mesure de suspension dans l'attente du jugement. Dans le droit actuel, cette protection ne s'applique pas si le requérant a déjà introduit une demande de réorganisation judiciaire moins de six mois auparavant. Cette période est étendue à 12 mois (avec toutefois la possibilité pour le tribunal d'y déroger par une décision motivée).

  • Nomination d'un administrateur provisoire : à la demande de tout intéressé, ou du ministère public, le tribunal peut nommer un administrateur provisoire pour la durée du sursis s'il constate que le débiteur ou l'un de ses organes a commis une faute grave et caractérisée.

  • Nomination d'un praticien de la restructuration : dans le cadre d'une réorganisation judiciaire par accord collectif, le tribunal de l'entreprise peut, à la demande de toute partie intéressée, nommer un praticien de la restructuration pour assister le débiteur et les créanciers dans la négociation et l'élaboration d'un plan de réorganisation.

  • Demande de levée des effets de la suspension: en partie pour éviter un effet boule de neige, les créanciers ont la possibilité de demander au tribunal de l’entreprise de lever les effets du sursis à leur égard. Le créancier qui souhaite invoquer cette possibilité doit démontrer qu'il est manifestement lésé par la suspension ou que sa propre continuité est menacée.

 

En conclusion, pour les PME[1], les règles actuelles de l'accord amiable et de l'accord collectif sont largement préservées. Elles échapperont au système complexe de vote par classes sur le plan de réorganisation dans le cadre d'une réorganisation judiciaire par accord collectif, à moins qu'elles n’optent d’elles-mêmes pour ce système. Nous reviendrons plus en détail sur ce système dans notre prochain bulletin d'information de cette série portant sur la transposition de la directive "restructuration".



[1] La vigilance s'impose pour les PME qui, en tant qu'entreprises affiliées, répondent ensemble aux paramètres des grandes entreprises : elles tomberont sous le régime des grandes entreprises.

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